Matériel de guerre: La «lex Ukraine» conserve une petite chance à Berne

Publié

Matériel de guerreLa «lex Ukraine» conserve une petite chance à Berne

La Commission de politique de sécurité propose un compromis pour autoriser sous certaines conditions du matériel militaire suisse à l’Ukraine. Mais l’opposition reste forte.

Eric Felley
par
Eric Felley
Scène de guerre le 20 février 2023 dernier dans la région de Donetsk. L’Ukraine a besoin de munitions, notamment qui viendraient de Suisse.

Scène de guerre le 20 février 2023 dernier dans la région de Donetsk. L’Ukraine a besoin de munitions, notamment qui viendraient de Suisse.

AFP

Depuis plusieurs semaines, la pression monte sur la Suisse pour qu’elle autorise la réexportation d’armes acquises par certains pays (en particulier l’Allemagne) vers l’Ukraine. Le Conseil fédéral y a répondu par la négative en raison de la loi en vigueur très restrictive dans ce domaine. À Berne, des nombreuses propositions ont été faites par le Parti socialiste, le Centre ou le PLR pour que la Suisse assouplisse ses règles en raison notamment de l’agression russe et du droit de l’Ukraine à l’autodéfense.

En ce début de semaine, la Commission de politique de sécurité du Conseil national s’est à nouveau attelée à trouver une solution. «La majorité de la commission est d’avis que la Suisse se doit de soutenir l’Ukraine de manière plus importante, et ainsi d’apporter sa contribution à la sécurité européenne». Elle a donc maintenu sa proposition d’assouplir l’interdiction de réexporter du matériel militaire – la «lex Ukraine» - mais de justesse, par 13 voix contre 12. Et cela, malgré l’opposition de la commission sœur du Conseil des États.

Une solution hybride

Dans ce dossier complexe, qui sera traité durant la deuxième semaine de la session de printemps début mars, la commission a adopté, par 12 voix contre 10 et 3 abstentions, une autre initiative parlementaire, qui fait un mix avec la solution retenue par le Conseil des États. D’une part, la déclaration de non-réexportation pourrait, sur la base d’une décision du Conseil fédéral, être limitée exceptionnellement à 5 ans. D’autre part, la réexportation de matériel de guerre vers un pays en guerre serait possible «si celui-ci fait usage de son droit d’autodéfense en vertu du droit international public. Une violation de l’interdiction de l’emploi de la force doit ainsi avoir été sanctionnée par une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies ou par une majorité des deux tiers de l’Assemblée générale des Nations Unies».

Pour la minorité de la commission, hormis le fait que cette solution est contraire à neutralité helvétique: «Cette modification pose problème dans la mesure où une décision l’Assemblée générale des Nations Unies ne présente pas de légitimité légale». La minorité estime aussi que cette solution ne résout pas les problèmes posés par les déclarations de non-réexportation: «puisque le Conseil fédéral devrait toujours décider au cas par cas d’autoriser ou non les demandes des pays acheteurs de matériel de guerre suisse».

PLR et UDC pas sur la même ligne

Au Parlement, les plus réfractaires à assouplir la loi sur le matériel de guerre sont les représentants des Vert.e.s et de l’UDC, avec des arguments pacifistes pour les premiers et des craintes pour la neutralité chez les seconds. Le président du PLR, Thierry Burkart, critique son partenaire bourgeois: «En refusant d’adapter la loi sur le matériel de guerre, l’UDC amorce la mort lente de notre industrie de l’armement», a-t-il déclaré mardi dans les journaux de Tamedia. Sans réexportation possible, «plus personne ne va acheter de matériel de guerre suisse, ce qui met la survie des entreprises suisses d’armement en péril».

Ton opinion

50 commentaires