Pierre Richard: «J’ai amadoué Johnny Depp grâce au rire et au vin»

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InterviewPierre Richard: «J’ai amadoué Johnny Depp grâce au rire et au vin»

L’acteur de 88 ans jouera son spectacle «90 minutes avec…» à Conthey (VS), le 9 février. Il nous parle de ses rencontres les plus mémorables, mais aussi de son rôle de Panoramix, dans le film «Astérix» qui sort ce mercredi 1er février.

Fabio Dell'Anna
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Fabio Dell'Anna
Une dégustation des vins de Pierre Richard aura lieu à Conthey le 9 février, avant le spectacle, à partir de 15h.

Une dégustation des vins de Pierre Richard aura lieu à Conthey le 9 février, avant le spectacle, à partir de 15h.

imago images / CTK Photo

En soixante ans de carrière, Pierre Richard a côtoyé du beau monde: Gérard Depardieu, Louis de Funès, Jean Carmet, Yves Robert, Mireille Darc, Eddy Mitchell, pour ne citer qu’eux. Et a un tas d’anecdotes à leur sujet que le Gaston Lagaffe du cinéma raconte dans «90 minutes avec…». «Je n’ai pas pu résister au projet», nous explique le comédien de 88 ans, en visio-conférence. Actuellement au Brésil pour se reposer, il écourtera son séjour pour se produire à la salle polyvalente de Conthey (VS), le 9 février prochain. Celui que l’on connaît notamment grâce au «Grand Blond avec une chaussure noire» sera accompagné d’un orchestre de sept musiciens.

Les cheveux en pétard car «il est 7h du matin au Brésil», Pierre Richard se remémore pour nous quelques souvenirs avec l’humour qu’on lui connaît. Il souligne se réjouir particulièrement de revenir dans notre région. «Le public suisse a toujours été formidable avec moi. Il m’adore alors que moi pas», plaisante-t-il avant d’ajouter être toujours émerveillé par nos montagnes et le lac. «J’ai d’ailleurs navigué dessus. Je reviens souvent pour le travail, le plaisir et aussi parfois pour mon vin, car l’un de mes importateurs se trouve chez vous», dit-il.

D’ailleurs, Conthey Show organise également une dégustation des crus de Pierre Richard et de chocolat Ramsauer dès 15h, le jour du spectacle. À 17h, des mets valaisans seront servis et, après le show, le public pourra se régaler d’une raclette.

Comment est née cette idée de spectacle de «90 minutes avec…»?

C’est une idée de mon ami producteur David Becker. En gros, j’ai juste besoin d’être sur scène, il m’interroge et je raconte ma vie d’artiste. Il y a aussi un orchestre. Je suis allé à Clermont-Ferrand (F) pour la première et ça m’a tellement amusé que désormais j’accepte à chaque fois qu’il me propose une nouvelle date. Je vais d’ailleurs écourter mon séjour au Brésil pour venir vous voir en Suisse.

Cela veut dire que le spectacle change un peu selon les dates?

Les questions restent les mêmes sauf que je change la manière de raconter l’histoire. Cela dépend de mon humeur. Je suis en phase avec le public et je regarde ce qui lui plaît. Enfin, ça dépend si j’ai bu un verre de trop ou non. (Rires.) Quoi qu’un verre de trop ne changerait pas grand-chose, mais deux verres de trop pourraient nuire au spectacle. Je me perds… Pour répondre à votre question: le spectacle n’est jamais tout à fait le même, car il n’a jamais été vraiment écrit.

Vous n’avez jamais le trac?

Non. Le seul moment où je commence à avoir le trac est lorsque je dois me souvenir d’un texte. J’ai toujours eu peur d’un trou de mémoire. Certains comédiens arrivent très bien à gérer ces situations avec une facilité qui me déconcerte. Pour ma part, mes yeux s’écarquillent, j’ai les mains qui tremblent et je ne sais plus où j’en suis. Mais pour ce projet, il n’y a pas de problème car il s’agit de mon texte. Ce n’est que du plaisir.

Pour la création de votre spectacle, vous vous êtes replongé dans vos souvenirs. Lesquels vous rendent le plus nostalgique?

Les moments qui me rendent nostalgiques, mais qui à la fois m’amusent beaucoup, sont lorsque je parle des gens avec qui j’ai travaillé. Ces personnes ont toujours été étonnantes, imprévisibles et, parfois, ingérables. Je ressens une plus forte nostalgie lorsque j’évoque les amis qui ne sont plus là, comme Mireille Darc ou Yves Robert. S’il faut que je parle du champion toutes catégories des ingérables, c’était Jean Carmet. Il était le plus redoutable, car on aurait dit un petit comptable. J’ai tourné tellement de films avec lui que je savais exactement comment cela se passait. Je précise qu’il n’était pas ingérable pour moi, il l’était surtout avec le metteur en scène. (Rires.) Dans le genre, Gérard Depardieu est pas mal aussi. Il fallait également faire très attention avec Bernard Blier. Il pouvait être ingérable, mais il ne supportait pas ceux qui l’étaient. Tout ça pour vous dire que l’on retrouve beaucoup de drôleries dans le spectacle. Je n’ai qu’à me laisser aller pour raconter ce qui s’est passé avec ces gens-là. D’autant plus que maintenant le système est nettement plus difficile aujourd’hui. À l’époque, on pouvait faire une partie de boules au milieu du tournage…

«Michel Bouquet était brillant en tant que comédien, mais aussi dans la vie de tous les jours. Je me souviens que, lors de notre première rencontre, je n’avais pas dit un mot.»

Pierre Richard, comédien

Vous mentionnez Gérard Depardieu. Comment est née votre amitié?

Elle est née la première fois que l’on a tourné ensemble (ndlr.: dans «La chèvre» en 1981). On ne se voit pas souvent, car il n’est jamais là. Il dirait exactement la même chose me concernant. (Rires.) On s’écrit des petits mots d’amour et on se croise sur scène parfois, comme à Clermont-Ferrand en octobre dernier lorsqu’il m’a rejoint lors de mon spectacle. On s’est foutu de notre gueule pendant deux heures. C’était génial.

Avez-vous déjà été impressionné lors d’une rencontre avec une personnalité?

Tout le temps! Mais si je dois vous raconter une anecdote, je vais choisir celle avec Michel Bouquet. J’avais joué avec lui dans «Le jouet» de Francis Veber. Pour moi, c’est un énorme comédien. Lors de ce tournage, j’ai eu l’honneur qu’il m’accorde son amitié. À chaque fois qu’il était au théâtre, j’allais le voir et on passait trente minutes dans les loges. Il était brillant en tant que comédien, mais aussi dans la vie de tous les jours. Je me souviens que, lors de notre première rencontre, je n’avais pas dit un mot. Je le fixais avec des yeux de jeune fille apeurée. Quand on est parti, Francis Veber nous a accompagnés jusqu’au trottoir. Je lui dis: «Au revoir! À bientôt, Monsieur Bouquet.» En marchant, ma chaussure s’est coincée dans une grille d’égout et je suis parti en chaussettes. Michel a éclaté de rire et m’a dit: «Vous voyez Monsieur Richard, voilà les choses que je ne saurai jamais faire et que je regrette.» La glace était brisée.

Maïwenn et Johnny Depp sur le tournage de «Jeanne du Barry», prévu en 2023 sur Netflix.

Maïwenn et Johnny Depp sur le tournage de «Jeanne du Barry», prévu en 2023 sur Netflix.

Netflix

Vous avez aussi tourné dans le film de Maïwenn, «Jeanne du Barry», qui doit sortir cette année. Vous y avez joué avec Johnny Depp. Comment était cette expérience?

Je l’ai fait rire. Cela marche avec les femmes, mais cela fonctionne aussi avec les hommes. Il a tellement rigolé le premier jour qu’après il ne me quittait plus. Enfin, je ne parle pas du soir. (Rires.) Il faut dire que je lui avais aussi amené quelques bouteilles de vin. je l’ai amadoué avec le rire et le vin.

«Je n’ai pas tourné longtemps dans «Astérix», car à l’époque j’avais encore très mal à ma jambe gauche. J’avais une crise d’arthrose énorme.»

Pierre Richard, comédien

Vous êtes aussi Panoramix dans le nouvel «Astérix» qui sort ce 1er février en salle. Comment s’est passé le tournage?

Je n’ai pas tourné longtemps, car à l’époque j’avais encore très mal à ma jambe gauche. J’avais une crise d’arthrose énorme. Je venais sur le tournage avec des béquilles et, quand on disait «moteur!», on me les enlevait pour me donner un gros bâton en bois. Je ne pouvais pas avancer deux mètres tellement j’avais mal. Etonnamment, ça ne se voit pas. Le paradoxe était aussi que je ne pouvais pas marcher, mais je ne supportais pas d’être assis. Je vous laisse imaginer mon humeur, après trois heures au maquillage… Le film est très beau et très bien filmé.

Dans chacune de vos interviews, on sent votre amour pour la comédie. Il n’y a jamais eu des moments de doutes?

Non, jamais. J’ai eu des moments où j’ai eu envie de faire autre chose, et désormais je me le permets. Vous me parlez de comédie, mais par exemple, dans le film de Maïwenn, je joue le duc de Richelieu. Je ne me prends pas les pieds dans le tapis pour faire rire. Parfois, j’ai donc envie de personnages plus dramatiques. J’ai d’ailleurs accepté un rôle dans un film géorgien où je meurs à la fin. C’est bien la première fois que j’étais ravi de mourir.

«Le jour où j’ai été engagé par Maurice Béjart, j’ai reçu la proposition de faire la première partie de Georges Brassens»

Pierre Richard, comédien

Vous avez déjà tant accompli pendant votre carrière. Vous avez encore des envies?

Je n’ai que ça. J’ai des envies de tourner et de jouer. Être sur scène et sur un plateau de cinéma, c’est comme une cure de jouvence. Parfois, j’arrive fatigué au début des répétitions et, au bout de deux mois, je suis en pleine forme. Ce n’est pas la peine de dépenser de l’argent en thalasso. C’est plus rapide, ça me coûte moins cher et en plus je suis payé. (Rires.)

Vous êtes aussi un amoureux de musique et de danse.

À 18 ans, j’adorais le jazz. Ensuite, je me suis passionné pour la danse, c’est vrai. J’étais accro à toutes les comédies musicales américaines. J’ai fini par en faire moi-même pour le plaisir. Je n’ai jamais vraiment eu l’occasion de m’en servir pour le cinéma car en France il n’y en avait presque pas. J’ai même failli aller chez Béjart. Le jour où j’ai été engagé par Maurice Béjart, Victor Lanoux et moi avons reçu la proposition de faire la première partie de Georges Brassens à Bobino. Finalement, j’ai refusé l’offre de la danse. J’ai apparemment bien fait, car je ne suis pas sûr que j’aurais pu être encore danseur aujourd’hui.

«90 minutes avec…» de Pierre Richard, salle polyvalente de Conthey, 9 février à 20 h. La billetterie est déjà ouverte. Une dégustation des vins de l’acteur et de chocolat aura lieu à 15 h. Une raclette sera servie après le show.

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